Énergie numérique et décarbonation : comment faire bon ménage ?
Énergie numérique et décarbonation : comment faire bon ménage ?
En pleine évolution, le secteur du numérique occupe une place croissante dans notre vie quotidienne et celle des entreprises. Mais quel est l’impact des entreprises du secteur tertiaire sur le bilan carbone ? La lutte contre le dérèglement climatique passe par des adaptations.
D’après l’Ademe et l’Arcep, les terminaux génèrent l’essentiel des impacts environnementaux. Photo d’illustration Adobestock
Les données ont été mises à jour par l’Arcep en novembre dernier. D’après l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse , le domaine du numérique contribue actuellement à hauteur de 3 à 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) et à 2,5 % de l’empreinte carbone de la France. Comparée à d’autres secteurs comme les transports, qui représentent 31 %, ou encore le bâtiment (23 %), l’empreinte environnementale du numérique reste relativement faible.
Mais toujours selon l’Arcep, qui avait rendu en 2022 avec l’Ademe (l’agence de la transition écologique) un rapport au gouvernement en place, les émissions de GES de l’industrie du numérique, compte tenu de sa croissance rapide, pourraient augmenter de 60 % d’ici à 2040. Elles représenteraient alors 6,7 % des émissions de GES nationales. Près de trois fois plus en 15 ans…
Cegid : le numérique, c'est 12,5% de son bilan carbone
Mais comment calculer l’empreinte carbone du numérique ? D’après l’Ademe et l’Arcep, les terminaux (et en particulier les écrans et téléviseurs) génèrent l’essentiel des impacts environnementaux (de 65 à 92 %), suivi des centres de données (de 4 à 20 %) puis des réseaux (de 4 à 13 %). « Dans notre parc informatique, la consigne est de travailler uniquement sur un seul écran, de changer moins souvent le matériel », nous explique Antoine Wattinne, directeur des affaires publiques et de la RSE à Cegid. L’éditeur lyonnais de logiciels de gestion pour la finance, les ressources humaines, le retail, affiche 24 000 tonnes de GES émises à son dernier bilan carbone (*).
« Dont la moitié est représentée par les achats de biens et services. Le numérique, c’est 3 000 tonnes », relativise Antoine Wattinne qui précise que chez Cegid, « tout est externalisé en termes de serveur chez des fournisseurs de cloud (Microsoft Azure, Kyndryl, OVH) et seuls 10 % de nos clients ont leurs propres serveurs ». Le groupe, qui va quitter son siège des quais de Saône pour emménager en 2027 dans un nouveau bâtiment boulevard Stalingrad (Villeurbanne) à la place de l’Espace Tête d’Or, va proposer prochainement des datas lakes (une méthode de stockage de données massives) pour inciter ses clients à réaliser leur bilan carbone. « Car la première chose à faire pour parler de poids des GES, de décarbonation, c’est son bilan carbone. »
"Toute cette industrie est invisibilisée"
Expert-comptable à Lyon, Octavie Véricel penche dans le même sens. Mais cette spécialiste des questions de durabilité est beaucoup plus fataliste sur l’impact du numérique.
« Dans les entreprises, on est, comme dans la population civile, relativement aveugles sur ce sujet, dit-elle. Les datacenters sont les nouvelles giga usines super polluantes sauf qu’ils sont, pour raisons évidentes de sécurité, rendus invisibles. On ne les voit pas, on ne sait pas qu’ils existent, on ne sait pas qu’ils consomment une énergie incroyable. De la même manière, on ne voit pas les câbles sous-marins qui traversent les océans, ni les satellites trop hauts dans le ciel. Toute cette industrie du stockage et de la transmission des communications est invisibilisée. »